J'ai plus de téléphone fixe, ouin ouin. Il est mort de sa belle mort. Comme ça, il m'a lâché. Déjà on me disait qu'on tentait de me joindre, et qu'il n'y avait même pas le répondeur. Et moi je tentais d'appeler qui que ce soit, j'avais la ligne mais le numéro n'aboutissait pas, aucune sonnerie.
Mais le pire dans l'histoire, c'est que j'avais plein de numéros en mémoire, et que je n'ai pas recopié sur papier. Car il ne faut pas oublier que lorsqu'on m'a volé, on m'a aussi volé mon carnet d'adresses. Pffff... La galère !
Ceci dit, si les gens ne m'appellent pas, c'est qu'ils n'en ont rien à foutre de moi, ou alors comme moi, ils ont paumé leur carnet ou ont des difficultés avec leur téléphone, va savoir.
quand on pense qu'il y a quelques centaines d'années, la poste, c'était à cheval. Les gens s'écrivaient des missives et trois semaines après, les destinaires les recevaient, répondaient, et zou encore trois semaines.
Le type écrivait à sa belle : "je t'aime". La belle répondait "moi aussi". Il s'était écoulé un mois et demi.
Ceci dit, lorsque le type écrivait à sa belle, il y mettait plein de fioritures et racontait sa vie. "oh ma mie, ici, je me languis de toi, je ne suis plus qu'une ombre dans toi, le soleil est triste sans toi et patin machin coufin, trois feuilles de papier au moins. Et il racontait ce qu'il faisait mais il se languissait.
La belle, recevant cette missive tant attendue, sautait de joie. Mon amoureux joli. Elle humait le parfum de cette jolie lettre qui venait de si loin. Dehors les chevaux piaffaient. Elle n'avait de cesse que de répondre promptement. Alors elle-même, elle griffonait trois pages, de sa plus belle écriture, trempant sa plume dans le bel encrier, à la lueur d'une bougie chanchelante, déclarait sa flamme, faisant un bisou sur le papier à gros grain. Et remettait la missive au postier qui, après s'être quelque peu restauré, changeait de chevaux et repartait de plus belle.
Maintenant, ce sont les sms. Lol rv à la gare dans 2 mn. bientôt on ira plus vite que la lumière et on sera arrivé avant même d'être parti !
Ils m'énervent tous avec leurs portables. C'est une sacrée invasion. Au départ, c'était cool. S'appeler d'où on est et communiquer avec ceux qui en avaient un.
"allo t'es où ?"
vite vite on se filait rencard et hop c'était réglé.
Maintenant, les portables, ils sont des applications !
Ce n'est plus fait QUE pour téléphoner, c'est fait aussi pour que quand tu t'emmerdes, là où tu es, hop tu sors cette boite magique et tu vas sur des applications.
Pi c'est magique, parce que tu mets ton doigt dessus, hop ça obéit, tu mets ton appareil dans l'autre sens, et zou l'image elle te suit. Et à chercher des trucs pas poss, hop tu bouffes la batterie. Et c'est fragile ces batteries ! bien sur tu les recharges, et plein de fois. Mais un jour, la batterie elle lâche. Et tu vas changer d'appareil parce que c'est moins cher que la batterie. Nul ! La surconsommation, la destruction de la planète.
T'as un tout petit trou à ta chaussette ? hop, à la baille on rachète une autre paire, c'est pas chair. (oups le lapsus !); c'est pas cher. Même que t'en rachètes trois paires, toutes les mêmes. Au moins, quand y a un trou dans l'une, il y a en encore d'autres ! Jusqu'au jour où tu veux trouver une paire, et tu n'en as qu'une !!!
Ça c'est le vrai mystère des chaussettes dépareillées ! Il y a des trucs totalement récurrents. Le mystère des chaussettes dépaillées, que lorsque enfin tu as trouvé l'autre, au bout de cinq jours, c'est la première qui a disparue.. Et un autre truc récurrent, c'est Sophie la girafe !
Je vais avoir bientôt soixante ans, et cela fait des lustres que je connais Sophie ! Avant même d'être enceinte, je voyais des gamins machouiller Sophie. Mon fils a eu Sophie, tous les gamins que j'ai vu depuis ont eu Sophie, Et la dernière en date, c'est le jouet d'un chien. Couiiiiing, couiiiiiiiiiiiing faisait la sophie !
Cette girafe est magique. Elle plait à tout le monde !
Fait chier. Faut que j'aille faire les magasins pour me trouver un nouveau téléphone. Mais c'est les soldes et j'ai horreur des soldes. Pas des soldes en elles-mêmes, mais du monde, je suis un tantinet claustro. Et pour monter dans le temple de la consommation, il me faut une sacrée dose de courage et anti-douleurs.